Au moment où je me lançais dans la rédaction du nouvel article, je suis retombée sur un autre plus ancien rédigé depuis un moment et une très courte vidéo que j’ai aussitôt voulu partager avec vous. Profitez d’un pur moment de bonheur. Regardez et… surtout écoutez !

 

 

Extrait du film « Clara et Moi » d’Arnaud Viard sorti 2004 avec Julie Gayet & Julien Boisselier,
Musique Originale Benjamin Biolay

Le texte dit par Michel Aumont est issu du roman Les Cahiers de Malte Laurids Brigge de Maria Rainer Rilke.

Quelques mots à propos de Maria Rainer Rilke

 

Rainer Maria Rilke, de son vrai nom René Karl Wilhelm Johann Josef Maria Rilke, est un écrivain autrichien. Né le 4 décembre 1875 à Prague, il peurt le 30 décembre 1926 à Montreux (Suisse).

L’auteurl est surtout connu comme poète, bien qu’il ait également écrit un roman, Les Cahiers de Malte Laurids Brigge, ainsi que des nouvelles et des pièces de théâtre.

 

Les Cahiers de Malte Laurids Brigge

 

Ce roman de Rilke est d’une grande beauté et ne ressemble à rien d’autre. Rilke a mis six ans à rédiger ces soixante et onze fragments en prose.

Résumé :

Malte Laurids Brigge est un jeune poète de vingt-huit ans, solitaire et maladif. Arrivé à Paris peu de temps avant le début de l’écriture des Carnets,  il consigne ses pensées éparses et fragmentaires dans son journal intime. Malte évoque ses difficultés d’écrire, la pauvreté qui l’entoure et l’omniprésence de la souffrance et de la mort. Il rapporte également des souvenirs d’enfance, en Scandinavie. Sous les traits de Malte, bien sûr, se dévoile Rilke.

 

 

Le texte entendu dans la vidéo est tellement beau que je le mets en intégralité. Délectez-vous !

 

Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les petites fleurs en s’ouvrant le matin. Il faut pouvoir repenser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours d’enfance dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait qu’on froissât lorsqu’ils vous apportaient une joie et qu’on ne la comprenait pas (c’était une joie faite pour un autre), à des maladies d’enfance qui commençaient si singulièrement, par tant de profondes et graves transformations, à des jours passés dans des chambres calmes et contenues, à des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de voyage qui frémissaient très haut et volaient avec toutes les étoiles, – et il ne suffit même pas de savoir penser à tout cela. Il faut avoir des souvenirs de beaucoup de nuits d’amour, dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes accouchées qui se refermaient. Il faut encore avoir été auprès de mourants, être resté assis auprès de morts, dans la chambre, avec la fenêtre ouverte et les bruits qui venaient par à-coups. Et il ne suffit même pas d’avoir des souvenirs. Il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux, et il faut avoir la grande patience d’attendre qu’ils reviennent. Car les souvenirs eux-mêmes ne sont pas encore cela. Ce n’est que lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard, geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est qu’alors qu’il peut arriver  qu’en une heure très rare, du milieu d’eux, se lève le premier mot d’un vers.

 

Vous l’avez sans doute compris, j’adore ce livre entre roman, méditation poétique et journal intime. Je précise quand même que le lecteur qui s’attend à lire un  roman risque d’être plutôt déçu.

Alors ai-je bien fait de changer d’article et de donner priorité au partage de cet instant magique ?

À bientôt

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