La semaine dernière, faisant écho à l’article traitant des bienfaits de l’écriture, Kate, abonnée au blog, m’a adressé un mail sur les méfaits de l’écriture. Merci Kate, j’ai trouvé vraiment intéressant de fouiller le sujet sous cet angle.
L’écriture est une activité humaine qui permet de communiquer, de transmettre des savoirs, de créer des œuvres littéraires ou artistiques. Si l’écriture peut comporter de nombreux bienfaits comme nous l’avons vu dans le dernier articles, elle peut aussi avoir des effets négatifs sur la société et les individus.
Voici quelques exemples de méfaits de l’écriture au sens large :
1 / L’écriture peut être source de stress, de frustration, de blocage ou de manque de confiance en soi…
pour certaines personnes qui ont du mal à exprimer leurs idées, leurs sentiments ou leurs opinions par écrit. Ecrire peut être pénible et pas toujours très jouissif. Il faut souvent s’y remettre, s’y reprendre. C’est une activité qui isole et qui rend solitaire. Mais écrire, c’est quand même oser dire ce qu’on ne dirait peut-être jamais. Et les mots disent parfois aussi des choses insoupçonnées.
2 / L’écriture peut avoir des effets négatifs sur la santé physique…
des écrivains, tels que des douleurs musculaires, des tensions articulaires, des maux de tête, des troubles visuels ou des problèmes de posture. L’écriture peut aussi entraîner une fatigue ou une baisse de l’immunité en cas d’excès ou de manque de sommeil.
3 / L’écriture peut provoquer des conflits ou des malentendus…
avec les lecteurs, les éditeurs, les critiques en fonction du contenu, du style, du ton ou du message du texte. Car écrire, c’est se donner à lire et risquer d’être critiqué, adoré ou… vénéré.
4 / L’écriture peut aussi être source de plagiat, de censure, de manipulation ou de propagande…
selon les intentions ou les intérêts des auteurs ou des destinataires. En effet, les textes écrits peuvent être utilisés pour diffuser des idées fausses, des mensonges, des discours haineux ou violents. Les lecteurs peuvent être influencés par ces textes sans avoir accès à d’autres sources d’information ou à un esprit critique.
Il faut donc rester vigilant et critique face aux textes écrits. Il faut vérifier les sources, comparer les points de vue, se renseigner sur le contexte et les intentions de l’auteur. Il faut aussi être capable de reconnaître et de dénoncer les discours fallacieux, mensongers ou dangereux.
5 / L’écriture peut entraîner la perte de la mémoire et de la tradition orale
En effet, les textes écrits peuvent remplacer la transmission orale des connaissances, des histoires, des légendes, des coutumes. Les peuples qui n’ont pas d’écriture peuvent être marginalisés ou oubliés par l’histoire officielle. Les individus qui s’appuient trop sur l’écriture peuvent perdre leur capacité à mémoriser ou à raconter.
Pour éviter la perte de la mémoire et de la tradition orale, il faut valoriser et préserver la diversité des cultures et des langues, respecter et soutenir les peuples qui n’ont pas d’écriture ou qui ont une écriture différente. Il faut aussi pratiquer et encourager la transmission orale des connaissances, des histoires, des légendes, des coutumes.
6 / L’écriture peut provoquer la dégradation de la langue et de la pensée
En effet, les textes écrits peuvent imposer des normes linguistiques rigides, des règles grammaticales ou orthographiques arbitraires, des styles littéraires figés. Les écrivains peuvent être contraints de se conformer à ces normes au détriment de leur créativité ou de leur originalité. Les lecteurs peuvent être réduits à des consommateurs passifs de textes standardisés.
Ainsi, restons créatifs et originaux dans l’écriture. Il faut oser s’affranchir des normes linguistiques rigides, des règles grammaticales ou orthographiques arbitraires, des styles littéraires figés. Il faut aussi être actif et curieux dans la lecture. Il faut chercher et apprécier les textes variés, innovants, stimulants.
Comme vous le voyez, l’écriture n’est pas une activité neutre ou innocente. Elle peut avoir des conséquences sociales, culturelles, politiques ou psychologiques importantes. Il faut donc être conscient des méfaits de l’écriture et savoir l’utiliser avec discernement et responsabilité.
Bonjour,
Absolument pas. L’écriture dégage plein de bonnes choses, et également pour le cerveau, les neurones.
J’écris depuis de nombreuses années, et je suis très en forme mentalement.
Bonjour lisez bien l’article ! L’avant dernier mettait en avant les bienfaits de l’écriture. En autres ceux que vous évoquez. Celui évoquent les méfaits et vous constaterez qu’ils sont non négligeables.
Bonsoir.
Après, je pense que chacun a sa sensibilité propre. Selon son ressenti, un commentaire peut être pris en bien ou en mal.
Tout dépend de la ferveur que l’on met dans ses écrits et de la dose d’implication et de « soi » qu’on donne à son écriture.
Bien sûr, les facteurs comme l’estime de soi, l’importance de l’avis des autres (lecteurs ou pas) et la confiance dans sa capacité à écrire sont très importants.
Ceci étant un avis personnel, bien entendu .
Bonne soirée
Bonjour tout le monde et bonjour Marie-Adrienne ! Quel bel article. J’adore, Marie-Adrienne (subtile petite virgule). Effectivement, c’est nous aider que de parler de tout. Merci (encore) pour ça.
Bienfaits ou méfaits ? Au bout de mon crayon se tenait surtout la souffrance.
De ma tendre enfance à l’âge avancé de la quarantaine, écrire fut un véritable tourment, une épreuve, une gageure. Cela qu’il s’agisse d’une lettre à mes parents, d’une rédaction scolaire, d’une demande administrative, d’un petit courrier d’amour, d’une note, d’un rapport ou d’un quelconque autre papier, même une carte postale. Je redoutais autant le fait de devoir m’exprimer clairement et de façon concise que l’acte d’écrire lui-même. L’idée de maintenir la plume ou le stylo sur une ligne imaginaire bien plane, avec de belles courbures pour chaque lettre, sans raté, ni pâté et surtout sans faute me torturait. Le respect des règles orthographiques et grammaticales dont je ne comprenais pas les sautes de logique ni n’en mémorisais les principes, était un véritable supplice, source d’anxiété, culpabilité, de dévalorisation totale, de sanctions également. De ce fait, je détestais l’école qui me portait à croire que j’étais une tâche profonde dans l’univers qui n’aurait d’avenir que celui de s’assombrir. Heureusement je n’étais pas seul dans cette galère. Quelques compagnons de d’infortune tapissaient le fond de classe, chacun pagayant à sa manière pour ne pas sombrer dans ce torrent d’une éducation sans âme. Pourtant, quoiqu’il arrive, l’instinct premier d’un enfant est d’exister, de se distinguer, de trouver refuge aussi. Ainsi, lorsque les élèves des premiers rangs s’interrogeaient avec jouissance sur les mystères des accords du participe passé, nous les cancres cherchions à nous évader vers d’autres registres qui nous étaient plus naturels, plus spontanés, plus originaux. Pour certains, c’était la mécanique en démontant tout matériel à proximité, pour d’autres, c’était l’humour et pour d’autres encore le dessin ou la gravure sur pupitre. Pour moi, c’était un peu tout. Il était inutile pour nous, les élèves étiquetés nuls, ignorants ou paresseux, de chercher à briller dans une autre matière scolaire comme la géographie, les sciences, les langues; Tout était à base d’écrits, mais surtout on ne nous prêtait aucun crédit.
Je parle de l’écrit, mais la lecture était également un exercice mettant à mal nos tous jeunes neurones qui n’étaient pas organisés comme ceux des «normaux». Je me rassurais en pensant qu’il n’y avait que 26 lettres pour composer cet enfer d’expression de la pensée, alors qu’il aurait pu y en avoir beaucoup plus : cent peut-être, cinq cents ou pourquoi pas des milliers comme en Chine. Je me considérais chanceux de ne pas être né dans ce pays, lointain heureusement, où la collection des caractères étranges de son «alphabet» démoniaque devait tenir dans un livre d’au moins la hauteur du maître d’école portant sur ses épaules le directeur avec son chapeau surmonté d’un ananas mûr à point. Je craignais que les petits Chinois, ceux qui nous ressemblaient bien sûr, ne fussent eux battus comme plâtre pour leurs difficultés à respecter les exigences graphiques, et probablement exubérantes, de leur drôle d’écriture.
En conséquence de cette misère pour lire et écrire, pendant que les autres petits écoliers apprenaient sereinement toutes sortes de choses qui les menaient, fiers et souriants, à recevoir lors la remise de prix de beaux cadeaux (des bouquins bien entendu !), moi le retardé congénital, je restais tétanisé, frustré, déçu, cloîtré dans une ignorance apparemment incurable. Aucun regard, aucune considération pour me consoler ou chercher en moi quelles étaient mes propres intelligences et belles sensibilités éventuelles qui pourraient enfin m’élever.
Perdu pour la voie royale de l’éducation, à la fin de ma 3ème, je fus «balancé» vers les sections techniques plus adaptées à mes carences; déficiences insoutenables aux yeux des gens bien éduqués de ma bourgade natale. Une mise au rebut courante s’imposait : Direction formation technique, section fabrication mécanique pour moi fils de chaudronnier. Tous les cancres du coin s’y retrouvaient. On se comprenait mutuellement, les profs connaissaient nos tares, nos parents n’attendaient plus rien de nous, les gens de la bonne classe étaient rassurés que leurs enfants ne nous croiseraient plus jamais. «Vade in pace parvulis» ou « Allez en paix les petits » furent les derniers mots de notre professeur de latin pour nous les extradés de la souveraine connaissance. Curieusement, ce fut pour une sorte d’absolution, proche de l’extrême onction, qui nous permettait, tout compte fait, d’aller briller paisiblement et sans remords au paradis des lanternes.
Et hop, bienvenue dans un lycée technique, celui de Saint-Quentin ! Un monde libre s’ouvrait enfin à nous. Adieu le pluriel des mots composés, l’emploi du subjonctif, les terminaisons fantaisistes des verbes irréguliers, l’étude des textes de Virgile et Homère, Rimbaud, Stendhal et les autres. A la benne tous ces bonhommes qui nous avaient fait tant souffrir ! Vive la logique, les formules techniques imperturbables, le dessin industriel et ses beaux ornements, les sensations uniques de la matière se déformant joyeuse sous nos mains, nos rêves et pensées transcrites en formes métalliques brillantes par des machines rugissantes néanmoins précises, prévisibles et sans jugement. Voilà enfin venu mon plumier rêvé, avec toutes ces plumes-outils par lesquelles j’allais pouvoir être moi-même, découvrir, apprendre et progresser dans un univers tout aussi noble, riche et complexe que celui de la littérature. Pour la première fois de ma vie je ressentais la joie et l’attrait d’apprendre. J’étais aux anges.
Mais le fait est que ces foutues 26 lettres persistaient dans ce paradis des vauriens. Décidément tout dans ce bas monde passait par l’écriture et la lecture. Certes les phrases étaient moins longues, plus concrètes, plus compréhensibles, sans philosophie, ni ambiguïtés. Des chiffres bien placés au sein des phrases agrémentaient la lecture, aéraient le texte parfois autant qu’un point virgule, mais ces diablotins voyelles et consones, ces maudites règles d’écriture resurgissaient avec le même despotisme.
Et puis, et nous ne l’avions pas imaginé, il fallut rédiger des rapports, des exposés, des notices ! Nous nous y sommes faits. Cela nous a demandé du temps, des larmes, de la sueur. La lecture elle-même était redevenue importante, primordiale sous peine d’un accident mécanique ou pire. Imaginez vous que certains de mes amis cancres ont fini par rédiger des notices techniques pour les pilotes d’avions de ligne….
Pourtant tout ce fit dans un autre esprit que celui du maître d’école coercitif des années 50-60, esprit étroit remplacé par celui du maître artisan plus ouvert où le préfixe «art» dans le mot était signe d’encouragement, de bienveillance, riche de perspectives.
Pour conclure, j’avoue que l’écrit m’a bien fait souffrir dans les jeunes temps de ma vie mais j’ai ensuite compris qu’il fonde l’homme dans tout ce qu’il est, ce qu’il fait. Aujourd’hui à mes 70 ans, l’aube de la vieillesse, l’écriture me permet d’être et d’en jouir. Hélas, j’empile toujours les fautes mais je me suis sorti honorablement de cette aventure mal engagée. Nulle rancœur, nulle revanche à prendre ou réparation à attendre. Pourtant je pense à ces enfants qui se heurtent toujours, comme il en fut pour moi-même, à ces bouts de crayon indociles, 103 touches aujourd’hui, qui leurs causent tant de peine et d’angoisse. Je leur souhaite de tout cœur de réussir à passer ce cap difficile.
Merci beaucoup Marie-Adrienne, pour cet article qui a réveillé en moi cette partie de ma vie ingrate, mais que je ne regrette absolument pas.
Gérard
Merci pour ce témoignage
J’ai adoré ce texte, Gérard ! Longtemps professeur de collège, j’ai essayé de donner à mes élèves le goût de lire et d’écrire… Malgré les terribles chausse-trapes et les rigidités parfois ridicules de notre orthographe et de notre grammaire (prononcer grand-mère, comme dans une pièce de Molière, les Femmes Savantes)…
Pour en revenir à l’expérience que vous transmettez, j’y vois une belle créativité dans le cadre de la classe, même si c’est au dernier rang, avec les « cancres » …
Et une plus belle encore dans ces études techniques qui vous ont permis de vous épanouir dans la reconnaissance de votre vraie intelligence !
Mais qu’elle est belle, votre écriture d’aujourd’hui, qu’elle est belle, cette mémoire de votre jeunesse. Merci de tout cœur
¡Quel beau témoignage!
Nous sommes le 25 juillet 2024. Je viens de vous lire. Je trouve cet écrit fabuleux. Envie de le partager et de le traduire à l espagnol ( ma seconde langue materne). Avec votre permission, évidemment.
L’ecriture est le seul moyen de ne jamais être interrompu (e).
Je parle en connaissance de causes.
Comme tout, il faut l’équilibre. Marie-Adrienne a bien écrit deux articles, un sur les bienfaits, l’autre sur les méfaits.
Depuis que j’écris, je ressens les deux. Ça dépend de tellement de choses, l’état d’âme du moment, l’inspiration qui s’offre à nous par magie ou l’angoisse de la page blanche. Un besoin compulsif de finir un chapitre et voilà qu’on ressent des douleurs dans les cervicales!
Comme vous dites dans votre article, il faut juste être conscient qu’écrire nous engage personnellement, donc ce n’est pas anodin.
En tous les cas, je prends toujours plaisir à lire vos articles. Il y a toujours matière à réflexion. C’est le but recherché
Merci et à bientôt