En décembre 2015, dans sa rubrique Culture, Loisirs, Média, BFM dressait un bilan de l’édition française…
Bilan de l’édition française
Selon les chiffres du Syndicat national de l’édition (SNE), la production éditoriale a explosé. En 25 ans, deux fois plus de titres sont publiés, mais avec des tirages deux fois moins élevés et des livres de moins en moins lus !
Quelques chiffres :
Nombre de titres différents publiés (nouveautés et réimpressions)
1990 : 38 414 dont nouveautés 20 252
1995 : 42 997 dont nouveautés 21 998
2000 : 51 887 dont nouveautés 25 832
2005 : 68 433 dont nouveautés 34 900
2010 : 79 308 dont nouveautés 40 021
2014 : 98 306 dont nouveautés 43 600
Exemplaires tirés (moyenne par titre)
1990 : 10 053 dont nouveautés 10 483
1995 : 8 981 dont nouveautés 10 024
2000 : 8 150 dont nouveautés 9 405
2005 : 7 587 dont nouveautés 10 085
2010 : 7 968 dont nouveautés 9 656
2013 : 5 991 dont nouveautés 7 895
Exemplaires vendus (moyenne par titre)
1990 : 8 440
1995 : 6 988
2000 : 6 814
2005 : 6 723
2010 : 5 698
2014 : 4 290
source : SNE
Quelles sont les conséquences ?
– La première, c’est qu’il est de plus en plus difficile de faire connaître toutes les nouveautés au public. Et par suite de les rendre visibles dans les circuits de vente traditionnelle ou numérique.
La grande majorité de ces livres sortent donc dans une indifférence totale. Selon la base de données Electre, les médias n’ont parlé que de 15 315 ouvrages différents en 2014, or on comptait 43 600 nouveautés publiées.
Pour vous dire à quelle aberration nous arrivons, Fabrice Guénier, auteur sélectionné pour le prix Renaudot 2015 a même dû publier une petite annonce dans Libération pour enfin « rencontrer un journaliste curieux »… Aucun média n’avait parlé de son livre !
cliquez et découvrez la preuve en image…
– La deuxième conséquence et non des moindres, c’est que pour être vendu, un livre doit être disponible. Or les libraires ne poussent pas leurs murs et leurs tables ne sont pas à longueur variable !
Le nombre moyen de titres disponibles dans les plus grandes librairies n’est que de 50 000. Toujours selon l’étude du SNE, pour une librairie de 100 mètres carrés, le stock tombe à moins de 15 000. Il en résulte que toute nouveauté qui ne rencontre pas immédiatement son public sera vite remplacée par les nouveautés de la semaine.
Les Français lisent globalement de moins en moins.
À ces conséquences s’ajoute une réalité : le public est bien loin de pouvoir absorber cette profusion. Mais aussi, les Français lisent globalement de moins en moins.
En 2005, 79% des Français déclaraient avoir lu au moins un livre dans l’année
En 2008, ils ne sont plus que 70%.
Livres lus (pour les Français lisant des livres)
1997 : 21 par an
2008 : 16 par an
Source : DEPS du ministère de la Culture
Bref, ce n’est donc pas parce qu’on publie deux fois plus de livres qu’on lit deux fois plus !
L’autre phénomène observé c’est que le doublement des titres sur les 25 dernières années a été compensé par une division par deux des tirages et des ventes.
Selon le SNE, aujourd’hui, un livre est édité à moins de 6 000 exemplaires en moyenne, et se vend à 4 000 exemplaires à peine.
Pire, tous éditeurs confondus, de Gallimard à Grasset en passant par P.O.L, énormément de livres se vendent à moins de 500 exemplaires. Et dans ces livres-là, beaucoup ne dépassent pas les 250 exemplaires vendus. Et ce n’est même pas rare qu’un livre se vende à moins de 100 exemplaires.
Jean-Hubert Gailliot et Sylvie Martigny, des éditions Tristram expliquent : « Ces chiffres sont si faibles que les écrivains pensent qu’ils sont faux. Certains jeunes auteurs ne croient pas les résultats des ventes, pensant que l’éditeur truque les chiffres pour ne pas payer les droits ».
Voilà vous en savez maintenant un peu plus sur le monde de l’édition française. Loin de moi l’idée de plomber le moral mais mieux vaut être averti.
D’ailleurs ces chiffres ne découragent pas les vocations. Il y a de plus en plus de gens qui écrivent et se projettent dans le fait d’être publiés. Selon l’Insee, le nombre d’auteurs a augmenté de 60% entre 1991 et 2011.
À vos succès d’écriture…
Merci, pour cette analyse très parlante, même si ça fait froid dans le dos.
Le pire c’est que l’édition française détient aussi le record mondial de publications issues de traductions d’ouvrages étrangers. Alors même qu’il est presque impossible à un auteur français de se faire traduire en anglais.
Dans ce domaine, comme dans bien d’autres, ce pays marche sur la tête.
Bonjour,
Merci d’avoir partagé avec ce texte. Si les français lisent de 5 à 10 livres par an, c’est qu’ils sont de grands lecteurs si l’on compare ceci avec les marocains, c’est catastrophique. Les marocains consacrent 3 minutes par an à la lecture.
3 minutes ! Trois questions me viennent, une par minute … Qu’appelle-t-on « lecture » ? Mon frère, par exemple, lit tous les jours plusieurs journaux mais ne trouve pas de plaisir à ouvrir un livre. Considère-t-on qu’il lit ou non ? La deuxième question concerne l’evaluation elle-même. Comment détermine-t-on ce résultat de 3minutes par an ? Le savez-vous ? Et enfin, ma troisième question m’amène à vous demander si vous savez comment, sur un plan socio-culturel, cela s’explique ? Votre commentaire m’a intéressée … Merci, donc. Laure
Il me semble que le marché de la revente des livres d’occasions participe également à la fonte des ventes de livres neufs. Si cet élément n’a pas déjà été pris en compte dans ce bilan, bien sûr.