Dans ce nouvel épisode de la série « L’Alchimie du roman », Jean-Philippe Depotte décortique « les Liaisons dangereuses », de Pierre Choderlos de Laclos.

 

 

 

 

Les Liaisons dangereuses 

 

 

À propos de Pierre Choderlos de Laclos

 

Pierre Ambroise François Choderlos de Laclos naît à Amiens en 1741, dans une famille de petite noblesse. Il est reçu au Corps royal d’artillerie en 1760. La vie de garnison lui laisse un peu de temps pour fréquenter les salons de Grenoble, et pour s’intéresser aux lettres. Après quelques menus essais infructueux, il publie en 1782 Les Liaisons dangereuses. Le succès retentissant est en partie dû au scandale que le roman provoque.

Après son mariage en 1786, il entreprend un ouvrage sur L’Éducation des femmes.

 

En 1788, il quitte l’armée. Après une période de recherche personnelle du meilleur moyen de favoriser son ambition et diverses tentatives pour approcher un grand seigneur, il entre au service du duc d’Orléans dont il partage les idées sur l’évolution de la royauté.

Pendant la Révolution, il a plusieurs rôles importants, s’inscrivant au Club des Jacobins en 1790.

Finalement, il fait la connaissance du jeune général Napoléon Bonaparte, le nouveau Premier Consul et se rallie aux idées bonapartistes. Le 16 janvier 1800, il est réintégré comme général de brigade d’artillerie et affecté à l’Armée du Rhin. Il est ensuite nommé commandant de l’artillerie de l’armée d’observation dans les Etats du royaume de Naples le 21 janvier 1803. Il meurt à Tarente, le 3 septembre, de dysenterie et de malaria.

 

 

 

 À propos des Liaisons dangereuses

 

Les Liaisons dangereuses, sous-titré Lettres recueillies dans une société et publiées pour l’instruction de quelques autres, est un roman épistolaire en 4 parties et constitué de 175 lettres.

 

L’intrigue se noue et se dénoue au fil des lettres qui répondent à une exigence précise de la narration.

 

Chaque partie a un rôle particulier :

 

– La première a une fonction d’exposition. Elle met en place les intrigues. Les deux entreprises le vicomte de Valmont / la présidente de Tourvel et la marquise de Merteuil / Cécile de Volanges sont en parallèle. Elle se clôt au moment où Merteuil va envoyer Cécile et sa mère au château de Rosemonde -> les 2 intrigues se rapprochent.

 

– La deuxième est concentrée autour de Merteuil (cf. lettre 81), c’est elle qui manipule, elle va réussir à convaincre Valmont de s’occuper avec elle de Cécile. Elle va manipuler la mère de Cécile, et va triompher de Prévan.

 

– La troisième se concentre cette fois-ci sur Valmont : c’est lui qui triomphe (il pervertit Cécile et la met enceinte, et réussit à conquérir la présidente de Tourvel)

 

– La quatrième, c’est le dénouement :

Merteuil va intervenir dans la relation Valmont / présidente de Tourvel et cela va aboutir à la chute des deux personnages :
Valmont :
* il est tombé amoureux de la présidente de Tourvel, donc il n’est plus libertin
* il perd Merteuil car elle refuse de revenir avec lui et elle prend le Chevalier Danceny comme amant
* il perd la présidente de Tourvel, et Merteuil lui interdit de réessayer de la reconquérir
* il perd la vie (l’apothéose)
Merteuil :
* Elle perd son procès, sa notoriété et sa santé.

 

Le roman épistolaire est à la mode à l’époque où Laclos écrit ce roman, mais sa particularité est d’avoir réussi à faire concilier le principe de la succession de lettres avec une intrigue dramatique très bien construite et vraisemblable dans laquelle chaque lettre tient une place nécessaire : la lettre n’est pas simplement un artifice, elle sert l’intrigue. Notons que chaque épistolier du roman a son style, ce qui permet au lecteur de mieux le cerner.

 

 

Malgré le scandale provoqué par la parution du roman, l’auteur se défend de toute immoralité de son œuvre. Il affirme dès la préface : « C’est rendre un service aux mœurs, que de dévoiler les moyens qu’emploient ceux qui en ont de mauvaises pour corrompre ceux qui en ont de bonnes, et je crois que ces lettres pourront concourir efficacement à ce but. » D’autant que la conclusion du récit semble tout à fait morale : l’exil et la mort pour les roués, un couvent pour Cécile, la mort aussi pour la Présidente. Finalement, le roman semble même s’inscrire dans la lignée classique des moralistes. Roman libertin ou moraliste, Les Liaisons dangereuses manifestent en tout cas cette évidence trouble : que les beautés de l’art prennent souvent leur source dans la perversité du mal.

 

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Comme à son habitude, Jean-Philippe Depotte analyse le roman selon quatre éléments :
• L’Eau, c’est le Style.
C’est la plume de l’écrivain, la poésie, la beauté du langage et le simple plaisir de lire de belles phrases.
• L’Air, c’est la Fiction.
C’est l’invention, qui prend deux formes, en général : l’intrigue (l’histoire que l’on raconte) et les personnages.
• La Terre, c’est le Milieu que décrit le roman.
C’est une époque ou c’est un lieu. C’est ce qu’apprend le lecteur sur la réalité que décrit le roman.
• Enfin le Feu, c’est le Message.
C’est la raison pour laquelle l’auteur a écrit son roman. C’est le message qu’il a voulu transmettre à son lecteur. Une philosophie, une morale ou, simplement, un sentiment, une impression.

 

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Découvrez la vidéo (16’24) :

 

 

 

Merci à Jean-Philippe Depotte pour son analyse. Un vrai plaisir. Je me souviens avoir été emballée par ce roman. Le premier roman épistolaire que je lisais. On ne pense pas assez souvent au genre épistolaire pour dérouler une intrigue et écrire son histoire ! À lire donc ou à relire pour s’imprégner d’une technique plutôt habile et captiver ses lecteurs.

 

 

À vos succès d’écriture…
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