Sandor Marai – Les Braises, chef-d’oeuvre de la littérature hongroise
Souvenez-vous dans cette rubrique Conseils de lecture, il est question d’évoquer des oeuvres à lire ou à relire. L’idée est de mettre en avant un auteur ou un roman pour sa qualité stylistique, narrative ou autre particularité.
Aujourd’hui, il est question du roman hongrois : Les Braises, de Sandor Marai
Biographie et bibliographie de Sandor Marai
Né en 1900 dans une famille bourgeoise hongroise, Sándor Márai est attiré très tôt par l’écriture. Journaliste, poète, auteur dramatique, traducteur littéraire, cet écrivain brillant connaît dès ses premiers romans le succès avec Les Révoltés (1930), Un Chien de caractère (1932) et surtout Les Confessions d’un Bourgeois (1934), écrits dans un style clair et réaliste. Encensé et adulé, il fait paraître Divorce à Buda (1935) et L’Héritage d’Esther (1939) qui sont autant de chefs-d’œuvre de la littérature hongroise.
Antifascite dans une Hongrie alliée de l’Allemagne nazie, Sándor Márai, est non seulement un grand romancier, mais aussi un homme courageux. Il poursuit son travail d’écrivain pendant toute la Deuxième Guerre mondiale, la Hongrie ne sera envahie par l’Allemagne que le 19 mars 1944. Il fait paraître deux superbes romans : La Conversation de Bolzano (1940) et Les Braises (1942), qui devient un véritable best-seller et dont il est question aujourd’hui.
En 1948, l’Allemagne vaincue, Sandor Marai désespéré, choisit l’exil, après l’entrée des chars russes dans Budapest. D’abord en France et en Italie, puis en Californie où il s’installe définitivement. Il se suicide à San Diego en 1989.
Durant ses 41 années d’exil, Sandor Marai poursuit l’écriture d’une œuvre immense en hongrois, comprenant des romans – dont Paix à Ithaque ! (1952) et Les Métamorphoses d’un Mariage (1980), l’important récit autobiographique, Mémoires de Hongrie (1972), des pièces de théâtre, des poèmes et des journaux intimes (de 1943 à 1983)
Sandor Marai a été reconnu en Hongrie, en 1990, un an après son suicide à San Diego. Son œuvre importante est désormais autant traduite et célébrée que celle de Stephan Zweig ou Joseph Roth.
Les Braises
Traduit pour la première fois en français en 1958, le roman Les Braises se présente en deux parties, à peu près égales : 9 chapitres pour la première, 10 pour la seconde.
L’histoire : En Hongrie, juste après la déclaration de la Seconde Guerre, dans un château isolé au pied des Carpates, Henri, un général à la retraite de soixante-quinze ans, attend. Depuis plus de quarante ans, il espère la venue d’un ami d’enfance, un compagnon de combat qui vit en Angleterre et qui seul pourrait réponde aux questions qui le taraudent.
Et voici que Conrad annonce sa venue. L’inconcevable se produit donc. Les amis réunis, ils se remémorent le passé. Les souvenirs de famille, d’adolescence, de campagne et surtout celui de Christine devenue l’épouse d’Henri et l’amie de Conrad. Un dialogue nourri de silences et de non-dits d’une force pathétique.
En cours de roman, Sandor Marai change brusquement le temps du récit et s’exprime au présent. Christine a-t-elle été éprise de Conrad ? Celui-ci a-t-il songé à supprimer son rival ? Les réponses se font jour et avec elles la vérité. Tout aura été dit. Conrad peut repartir laissant seul son ami jusqu’à la mort.
Ce que j’en pense :
Un livre tout simplement magnifique sur l’amitié. L’écriture Sandor Marai émerveille autant par son équilibre et sa justesse que, bien souvent, par sa beauté.
La prose est brillante dans les descriptions des lieux et des ambiances, mais se révèle incomparable dans la peinture des âmes et des émotions qui les étreignent.
Enfin, la construction de l’ouvrage est d’une très grande habileté. Le roman commence à l’aube et se termine à l’aube du lendemain avec le départ de Conrad : 24 heures, temps de la tragédie.
L’œuvre est rythmée de façon précise : chaque révélation émerge au moment où l’on sent qu’une réconciliation est possible entre les deux hommes.
Un dernier mot quand même pour souligner la très grande qualité de la traduction de ce roman.
Vous avez compris… j’adore ce livre et cet auteur ! Si vous ne connaissez pas Sandor Marai, je vous conseille de découvrir son œuvre flamboyante qui frappe par la perspicacité de ses observations, la justesse de son trait, la fascinante complexité de ses personnages et l’élégance majestueuse de son style. Peu d’écrivains possède cette précision de plume et cette justesse de ton.
Bonne lecture… À bientôt